Comprendre le burnout pour ne pas le subir ou le générer.
Une définition à travers les études de référence
Après mon burnout j’ai lu une trentaine d’études scientifiques pour mieux comprendre ce qu’il m’arrivait.
Parce qu’il n’y a pas de cause identifié on ne le qualifie pas de maladie mais de syndrome.
Le burnout est un phénomène multi-factoriel, multi-symptomatique qui rend sa détection et son identification complexe.
Voilà ma tentative plus personnelle que scientifique, de démocratiser les études qui m’ont le plus marquées dans un article.
Qu’est-ce que le burnout selon la définition commune et historique ?
Le burnout est reconnu par l’OMS comme un phénomène exclusivement lié au contexte professionnel.
Maslach et Leiter décrivent le burnout au travers de « l’écartèlement entre ce que les gens sont et ce qu’ils doivent faire. Il représente une érosion des valeurs, de la dignité, de l’esprit et de la volonté – une érosion de l’âme humaine. C’est une souffrance qui se renforce progressivement et continûment, aspirant le sujet dans une spirale descendante dont il est difficile de s’extraire…”
Le burnout est une réponse individuelle à un stress professionnel prolongé. Il affecte les dimensions cognitives, émotionnelles et comportementales, entraînant des attitudes négatives envers le travail et les collègues.
Il existe traditionnellement 3 dimensions qui sont interconnectées : l’épuisement conduit à la dépersonnalisation, suivie d’une perte d’accomplissement personnel.
1) l’épuisement émotionnel : Sentiment de fatigue intense et de débordement face aux exigences professionnelles.
2) la dépersonnalisation : Détachement et attitudes cyniques envers les collègues et les clients. (ex : on se réfère à un patient par son numéro de dossier)
3) la diminution de l’accomplissement personnel : Sentiment d’inefficacité et de perte de sens au travail.
Le burnout se traduit donc à la fois par :
une érosion de l’engagement (en réaction à l’épuisement),
une érosion des sentiments (à mesure que le cynisme s’installe)
une érosion de l’adéquation entre le poste et le travailleur (vécue comme une crise personnelle).
Dans les cas les plus extrêmes, le travailleur peut se trouver dans un état physique et psychique tel qu’il ne peut pas poursuivre son activité de travail ; ce qui peut être vécu comme une rupture, un écroulement soudain, alors que des signes avant-coureurs pouvaient le laisser présager.
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La définition proposée par le conseil supérieur de la santé en Belgique
Ce qu’il me manque dans la définition la plus commune, c’est l’absence de la philosophie de l’individu par rapport à son travail que l’on retrouve bien chez nos voisins belges.
En effet bien que le syndrome soit professionnel, il ne signifie pas qu’il est à la charge unique de l’employeur.
(C’est spécifiquement mon cas où je pense que j’aurais fait un burnout dans n’importe quelle startup early stage à ce stade de ma vie.)
C’est pour cela que j’aime tant la définition suivante :
« Un processus multifactoriel qui résulte de l’exposition prolongée (plus de 6 mois) en situation de travail à un stress persistant, à un manque de réciprocité entre l’investissement (exigences du travail, demandes) et ce qui est reçu en retour (ressources), ou à un déséquilibre entre des attentes et la réalité du travail vécue, qui provoque un épuisement professionnel (à la fois émotionnel, physique et psychique), une fatigue extrême que les temps de repos habituels ne suffisent plus à soulager et qui devient chronique ainsi qu’un sentiment d’être totalement vidé de ses ressources.”
Pour le conseil supérieur de la santé belge, le processus qui conduit au burnout est en quatre étapes :
1) Un enthousiasme idéaliste envers le travail : Le travail est perçu comme un moyen privilégié de s’accomplir. Ce qui apporte au travailleur beaucoup d’énergie.
(J’ai souvent tendance à dire qu’entre un top performer et un burnout il n’y a qu’un pas.)
2) Une fissure dans l’idéal : Face aux contradictions présentes dans les milieux professionnels (conflit de valeurs, dilemmes moraux), le doute quant à la véracité de l’idéal s’installe. Or la fin de l’idéalisation est angoissante. Pour ne plus y penser le travailleur s’investit dans un rythme de travail excessif.
3) Un retrait protecteur : Face aux idéaux qui se fragilisent, le travailleur ressent une nécessité grandissante de se protéger. Il préfère devenir cynique. Le détachement permet de tenir pendant un temps, automatisant et anesthésiant la pensée et les sentiments. Les atteintes se généralisent à la vie privée.
4) Le burnout : Si la situation perdure, l’idéal d’un travail épanouissant disparaît totalement. Un épisode critique marque souvent le passage au burnout avéré.
Ces deux définitions misent bout à bout, couvrent bien la réalité du burnout.
Symptômes et conséquences du burnout
Le burnout se manifeste par une combinaison de symptômes affectant plusieurs dimensions : émotionnelle, cognitive, physique, comportementale et motivationnelle. Ses effets peuvent être immédiats mais aussi évoluer vers des conséquences plus graves à moyen et long terme.
Manifestations émotionnelles et cognitives
Sentiment de perte de contrôle, peurs mal définies, tensions nerveuses.
Humeur triste, irritabilité, hypersensibilité ou, à l’inverse, absence d’émotion.
Difficultés de concentration, troubles de la mémoire, altération de la prise de décision.
Anxiété, insatisfaction générale, pouvant évoluer vers la dépression et, dans les cas extrêmes, le désespoir ou le suicide.
Manifestations physiques
Fatigue chronique, troubles du sommeil (insomnie persistante aggravant l’épuisement).
Douleurs musculo-squelettiques : tensions musculaires, douleurs dorsales et cervicales, maux de tête.
Troubles gastro-intestinaux : nausées, ulcères, pathologies liées au stress.
Prise ou perte de poids soudaine.
Hypertension, palpitations, augmentation du risque de maladies cardiovasculaires.
Affaiblissement du système immunitaire, entraînant une fréquence accrue des infections.
Dérèglement hormonal dû à une surproduction de cortisol.
Manifestations comportementales et interpersonnelles
Isolement social, agressivité, baisse de tolérance à la frustration.
Ressentiment et hostilité envers les collègues, conflits récurrents.
Négligence des responsabilités professionnelles et personnelles.
Présence de comportements addictifs (tabac, alcool, tranquillisants, drogues, fast-food).
Manifestations motivationnelles et professionnelles
Désengagement progressif, perte de motivation.
Effritement des valeurs associées au travail, sentiment d’être pris au piège.
Remise en question des compétences, dévalorisation de soi.
Augmentation de l’absentéisme et du présentéisme, avec une baisse de la productivité.
En l’absence de prise en charge, ces symptômes peuvent s’intensifier, entraînant des complications graves sur la santé physique et mentale, ainsi que des répercussions sur la vie sociale et professionnelle.
Évolution des symptômes du burnout
Le burnout évolue en plusieurs phases, chacune marquée par une intensification des symptômes :
Niveau 1 : Signes initiaux (léger)
Fatigue persistante, légers inconforts physiques et émotionnels.
Exemples : Maux de tête fréquents, difficulté à respecter les délais, démotivation progressive.
Niveau 2 : Aggravation des symptômes (modéré)
Troubles du sommeil, dégradation des relations interpersonnelles.
Exemples : Une enseignante devient irritable, un manager oublie des réunions importantes, un soignant se détache émotionnellement de ses patients.
Niveau 3 : Impact sur la santé et la productivité (sévère)
Évitement des responsabilités, comportements destructeurs.
Exemples : Un employé arrive fréquemment en retard, un travailleur social culpabilise mais n’arrive pas à corriger son comportement, un cadre utilise l’alcool pour gérer son stress.
Niveau 4 : Crise existentielle et comportements dangereux (extrême)
Isolement social, dépression chronique, risque élevé de suicide.
Exemples : Refus d’interaction avec les collègues, entrepreneur en arrêt de travail prolongé, professionnel de santé commettant des erreurs graves et exprimant des idées suicidaires.
Conséquences organisationnelles
Les salariés sont extrêmement forts à cacher leur mal-être, ce qui peut retarder la détection du burnout de plusieurs mois voire années, durant lesquels leur performance est bien inférieure à leur potentiel.
On appelle ce syndrome, la maladie du déni, dans le sens où le premier concerné n’a généralement aucune idée de ce qu’il lui arrive.
D’où l’importance que les leaders aient ce sujet en tête car ils peuvent aider leur prochain et aider leur organisation en aidant à identifier les symptômes.
Les impacts pour les organisations :
Accidents, erreurs et négligences entraînant des coûts importants.
Prise de décisions éthiquement discutables en raison de l’épuisement émotionnel
L’absentéisme lié au burnout est trois à quatre fois plus élevé que celui causé par d'autres maladies courantes
Le burnout peut se propager dans des groupes de travail en raison des émotions partagées (stress, peur) et de l’imitation des comportements.
Risque pour l’image de marque de l’entreprise, diminuant son attractivité.
Facteurs organisationnels et risques associés au burnout
Facteurs de risque
Intensité et surcharge de travail (+322 % de risque)
Volume excessif de tâches ou complexité élevée des missions.
Objectifs inatteignables, pression constante.
Interruptions fréquentes empêchant une gestion efficace du travail.
Manque de ressources (personnel, matériel, formation), augmentant la pression.
Fatigue physique et mentale.
Faibles récompenses (+86 % de risque)
Efforts non reconnus ou rémunération insuffisante augmentant la probabilité de burnout.
Manque de soutien social (+81 % de risque)
Faible cohésion d’équipe, isolement professionnel.
Conflits entre collègues, absence de solidarité.
Impact négatif sur la gestion du stress et le bien-être au travail.
Manque d’autonomie (+63 % de risque)
Absence de marges de manœuvre pour organiser son travail.
Impossibilité de prendre des décisions sur ses propres tâches.
Sentiment d’impuissance et d’insatisfaction accru.
Insécurité professionnelle (+39 % de risque)
Précarité de l’emploi, contrats courts ou renouvellements incertains.
Absence de visibilité sur l’avenir professionnel, générant une anxiété constante.
Autres facteurs de risque
(Je n’ai pas pris le temps de trouver la donnée mais ces facteurs sont reconnus dans plusieurs études)
Exigences émotionnelles élevées
Interactions difficiles avec le public ou la hiérarchie.
Obligation d’afficher des émotions contraires à son ressenti.
Travail émotionnel intense dans des professions comme l’enseignement, la santé ou l’accueil.
Conflits de rôles et de valeurs
Attentes contradictoires ou ambiguës sur le poste et les missions.
Travail perçu comme dénué de sens ou en contradiction avec ses valeurs personnelles.
Horaires de travail inadaptés
Horaires irréguliers, rotations de nuit ou travail en décalé.
Heures supplémentaires fréquentes, empiétant sur la vie personnelle.
Déséquilibre entre vie professionnelle et personnelle, favorisant l’épuisement.
Supervision et management inadaptés
Absence de reconnaissance ou de soutien de la hiérarchie.
Style de management perçu comme injuste ou inefficace.
Manque de communication et de feedback.
Facteurs protecteurs
1. Justice au travail (-65 % de risque)
Se sentir écouté et traité équitablement dans son environnement professionnel réduit significativement le risque d’épuisement émotionnel.
2. Soutien organisationnel
Un environnement collaboratif et juste protège les employés de l'épuisement.
Facteurs individuels
Modulateurs individuels du burnout
Influence de la personnalité sur le burnout
La personnalité joue un rôle crucial dans la manière dont les individus perçoivent leur environnement de travail et gèrent les exigences professionnelles.
Plusieurs études, basées sur le modèle des Big Five, montrent une association significative entre ces traits de personnalité et le burnout.
(J’en profite pour mettre un warning. L’individu joue un rôle mais le facteur prédéterminant c’est l’organisation de l’entreprise. Le burné n’aurait jamais fait de burnout dans une organisation carrée.)
Facteurs de risque
Neuroticisme (instabilité émotionnelle) : Ce trait, associé à une forte sensibilité au stress et à des émotions négatives, est positivement corrélé au burnout. Les personnes émotionnellement instables sont donc plus susceptibles d'en souffrir.
Ouverture à l'expérience : Ce trait, caractérisé par la créativité et l'intérêt pour de nouvelles idées, agit comme un facteur protecteur en favorisant un sentiment d'efficacité professionnelle et en réduisant la dépersonnalisation.
Perfectionnisme négatif : L’autocritique excessive et la peur de l’erreur augmentent la probabilité de burnout.
Locus de contrôle : Un locus de contrôle externe (croyance que les événements sont dictés par des forces externes) augmente le risque de burnout. Un locus de contrôle interne (conviction d'avoir une maîtrise sur les événements) réduit ce risque.
Personnalité de type A : Les individus compétitifs, impatients et agressifs combiné au besoin de tout contrôler, sont davantage exposés à l'épuisement émotionnel et à la dépersonnalisation.
Niveau d’implication et attentes élevées : Les travailleurs fortement investis, surtout lorsque leurs objectifs sont irréalistes, sont plus vulnérables au burnout.
Âge : Le burnout tend à diminuer avec l'âge, probablement grâce à une meilleure gestion du stress avec l’expérience. Toutefois, certaines études montrent que le risque de dépersonnalisation peut augmenter avec l'âge, bien que cela puisse être compensé par un plus grand sentiment d’accomplissement personnel.
Genre : Les femmes sont plus sujettes à l'épuisement émotionnel, tandis que les hommes présentent davantage de comportements liés à la dépersonnalisation.
Statut marital : Les personnes célibataires, en particulier les hommes, sont plus exposées au burnout. Chez les femmes, la charge combinée travail-vie domestique peut être un facteur de risque.
Facteurs de protection
Extraversion : Ce trait, lié à une attitude sociable et positive, est corrélé négativement au burnout. Les individus extravertis sont généralement plus résilients face au stress professionnel, ce qui en fait un facteur protecteur.
Perfectionnisme positif : Avoir des objectifs élevés en termes de performance diminue le cynisme et renforce l’accomplissement personnel.
Conscience professionnelle : La tendance à être organisé, responsable et persévérant réduit significativement les risques de burnout. Ces individus gèrent mieux les exigences professionnelles.
Amabilité : Les travailleurs agréables, qui privilégient la coopération et la bienveillance, présentent des niveaux de burnout inférieurs, car ils sont souvent mieux intégrés socialement dans leur milieu professionnel.
L’efficacité perçue : ma croyance en sa capacité à gérer une situation influe sur toutes les dimensions du burnout.
Plus l'expérience professionnelle est grande, plus cette efficacité perçue joue un rôle protecteur.
La pleine conscience : l’attention au moment présent avec une attitude d’acceptation réduit la probabilité de burnout.
L’intelligence émotionnelle : la capacité à comprendre, reconnaître et réguler ses émotions diminue l'épuisement, la dépersonnalisation et le sentiment de manque d’accomplissement personnel.
L’estime de soi : les individus qui fondent leur estime de soi sur leur performance professionnelle ressentent plus fortement l’impact du burnout.
Une estime de soi stable et indépendante des performances professionnelles agit comme un facteur protecteur.
Comment réussir à récupérer du burnout ?
Le chemin est long, beaucoup de théories différentes existent et j’essaie de glaner le maximum de témoignages pour pouvoir, petit à petit, offrir plus de certitudes.
Comme le sujet du post burnout est complexe il donnera lieu à un second article théorique que je m’efforce de sortir le plus rapidement possible.
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PS : Pour référence voilà les études sur lesquelles je base mon propos :